Aujourd’hui, Grégoire vous propose deux musiques qui imaginent un monde sans Dieu créateur, ou bien où la transcendance aurait disparue. Laissons-nous étonner et pourquoi pas interroger sur ces approches.
Vous pouvez écouter les deux morceaux, puis écouter les sentiments, les réactions, les pensées qui vous habitent. En faire l’occasion d’une prière vers Dieu.
Tout d’abord plongeons dans le monde du XVIII° siècle, la musique baroque de Jean-Féry Rebel (1666-1747). Il réalise en 1737 un ballet instrumental « Les Éléments, symphonie nouvelle. » particulièrement connu pour sa pièce introductive : « Le Cahos ».
Le style est très novateur et nous semble même proche de la musique contemporaine :
« La basse exprime la Terre par des notes liées ensemble et qui se jouent par secousses ; les flûtes par des traits de chant qui montent et qui descendent imitent le cours et le murmure de l’Eau. L’Air est peint par des tenues suivies de cadences que forment les petites flûtes. Enfin les violons par des traits vifs et brillants représentent l’activité du feu. »
D’une certaine manière, c’est la première fois que la création est présentée sans la présence de Dieu.
Autre approche, plus proche de nous : Georges Brassens sort en 1964 une chanson qui rejoint bien le thème de cette semaine « Le grand pan ». Le texte est grinçant, caricatural, mais il dit me semble-t-il ce que ressente aujourd’hui de nombreux contemporains. Faire l’expérience triste d’un monde vidé de Dieu par la science. Autrefois un bon repas, des amours ou des obsèques étaient autant de lieux de communion avec les dieux. Mais désormais tout semble dénué de transcendance.
Vous pouvez écouter cette chanson sur Youtube.
Voir les paroles
Du temps que régnait le Grand Pan,
Les dieux protégeaient les ivrognes
Un tas de génies titubants
Au nez rouge, à la rouge trogne.
Dès qu’un homme vidait les cruchons,
Qu’un sac à vin faisait carousse
Ils venaient en bande à ses trousses
Compter les bouchons.
La plus humble piquette était alors bénie,
Distillée par Noé, Silène, et compagnie.
Le vin donnait un lustre au pire des minus,
Et le moindre pochard avait tout de Bacchus.
Mais se touchant le crâne, en criant » J’ai trouvé »
La bande au professeur Nimbus est arrivée
Qui s’est mise à frapper les cieux d’alignement,
Chasser les dieux du firmament.
Aujourd’hui çà et là, les gens boivent encore,
Et le feu du nectar fait toujours luire les trognes.
Mais les dieux ne répondent plus pour les ivrognes.
Bacchus est alcoolique, et le grand Pan est mort.
Quand deux imbéciles heureux
S’amusaient à des bagatelles,
Un tas de génies amoureux
Venaient leur tenir la chandelle.
Du fin fond des Champs Elysées
Dès qu’ils entendaient un » Je t’aime « ,
Ils accouraient à l’instant même
Compter les baisers.
La plus humble amourette
Était alors bénie
Sacrée par Aphrodite, Eros, et compagnie.
L’amour donnait un lustre au pire des minus,
Et la moindre amoureuse avait tout de Vénus.
Mais se touchant le crâne, en criant » J’ai trouvé »
La bande au professeur Nimbus est arrivée
Qui s’est mise à frapper les cieux d’alignement,
Chasser les dieux du firmament
Aujourd’hui çà et là, les cœurs battent encore,
Et la règle du jeu de l’amour est la même.
Mais les dieux ne répondent plus de ceux qui s’aiment.
Vénus est faite femme, et le grand Pan est mort.
Et quand fatale sonnait l’heure
De prendre un linceul pour costume
Un tas de génies l’œil en pleurs
Vous offraient les honneurs posthumes.
Pour aller au céleste empire,
Dans leur barque ils venaient vous prendre.
C’était presque un plaisir de rendre
Le dernier soupir.
La plus humble dépouille était alors bénie,
Embarquée par Charon, Pluton et compagnie.
Au pire des minus, l’âme était accordée,
Et le moindre mortel avait l’éternité.
Mais se touchant le crâne, en criant » J’ai trouvé »
La bande au professeur Nimbus est arrivée
Qui s’est mise à frapper les cieux d’alignement,
Chasser les dieux du firmament
Aujourd’hui çà et là, les gens passent encore,
Mais la tombe est hélas la dernière demeure
Les dieux ne répondent plus de ceux qui meurent.
La mort est naturelle, et le grand Pan est mort.
Et l’un des derniers dieux, l’un des derniers suprêmes,
Ne doit plus se sentir tellement bien lui-même
Un beau jour on va voir le Christ
Descendre du calvaire en disant dans sa lippe
» Merde je ne joue plus pour tous ces pauvres types. »
J’ai bien peur que la fin du monde soit bien triste.
Pour aller plus loin
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Qu’est-ce que je ressens à la fin de cette écoute ou de cette lecture ? Quels sentiments ? Est-ce que cela me fait revenir en mémoire un moment de ma vie ?
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La musique profane de Jean-Féry Rebel parle de la nature, et donc pour nous de l’œuvre de Dieu dans le monde, son action créatrice. On y entend un monde qui s’unifie, qui s’ajuste peu à peu, sortant lentement des chaos de l’engendrement. Ces douleurs se poursuivent aujourd’hui : tremblements de terre, inondations, incendies… Un instant je confie ces situations et drames où le monde et la création ne semblent pas encore achevés.
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Georges Brassens parle des dieux qui protégeaient, se réjouissaient avec l’humanité, ou honoraient et accompagnaient dans les grands moments de la vie. Comme croyant, nous savons que Dieu ne se détourne pas de nous, qu’il n’abandonnera jamais son poste dans nos lieux de combats ou de souffrance. Avec mes mots, je le redis au Seigneur.